samedi 17 mai 2008

Un vent noir souffle sur l'Italie (3)

Depuis le quotidien Il Manifesto – 17-65-08, traduction et résumé d'une série d'articles :

Face à la déferlante raciste en Italie, faute d’une mobilisation de la gauche institutionnelle, des associations commencent à organiser la riposte. Il Manifesto rapporte ainsi qu’une manifestation contre le racisme institutionnel se prépare. Une journée de mobilisation contre les mesures prévues par le gouvernement dans le domaine de la sécurité et de l’immigration pourrait avoir lieu d’ici fin mai. Cette proposition est née hier durant un meeting organisé par un cartel d’association composé d’Antigone CNCA Arci, Ora d’Aria, associazione Link, Progetto Diritti, clandestini per forza, contre la directive de l’Union Européenne dans le domaine des immigrants et des rapatriements contre le projet de sécurité du gouvernement. Il s’agit de la première parmi les manifestations d’opposition sociale organisée par le monde des associations. Complice aussi le silence des derniers jours des forces institutionnelles à commencer par le Partito Democratico. « Nous sommes frappés de stupeur et d’indignation" a déclaré Patrizio Gonnella d’Antigone « il est important que les associations et les syndicats créent un front contre cette vague de violence institutionnelle. Beaucoup des mesures promises sont une véritable propagande. Ils devront nous expliquer où trouver un demi million de lit où placer les auteurs potentiels du délit d’immigration clandestine ». Les critiques contre les deux mesures italiennes et européennes sont de la même teneur. Dans les deux cas on a parlé de « dérive » de la culture et de la politique vers une approche exclusivement répressive de la sécurité au détriment de l’accueil et de l’intégration des immigrés. Le gouvernement espagnol par la voie de la numéro deux du gouvernement, Maria Teresa Fernadez de la Vega, condamne le politique en matière d’immigration et taxe ses mesures de racisme et xénophobie. En même temps deux manifestations auront lieu aujourd’hui à Vérone à la suite du meurtre d’un jeune garçons par cinq néo fascistes de la ville connus pour leur activismes raciste homophobe et faisant l’objet d’une enquête pour possession d’armes et de symboles nazis. Tout cela se passe dans la ville dont le maire de la Ligue du Nord, Flavio Tosi, s’illustre par ses provocation anti immigrés et par la nomination à l’institut historique de la résistance d’un membre de sa majorité municipale, ex membre du Veneto Front Skinhead et membre d’un groupe nazirock « Gesta bellica » qui a même déclaré qu’il « était fier d’être fasciste ». Ainsi face à la constitution d’un « bloc social » réactionnaire raciste et xénophobe et souvent nostalgique du fascisme, la gauche institutionnelle a refusé la participation des organisations des migrants à sa manifestation. La coordination des migrants de Vérone qui voulaient défiler avec le cortège antifasciste a été priée de faire manif à part. Pourtant comme le dit l’un des organisateurs « peut être que notre appel n’a pas été compris nous nous sommes adressés à tous les citoyens. Nous sommes des citoyens, nos enfants sont des citoyens et nous sommes des nouveaux citoyens italiens. Nous essayons de revendiquer nos droits mais nous sommes isolés surtout par les partis, mêmes ceux de gauche. La journée de samedi c’est la tentative de répondre à un acte violent, le meurtre de Nicolas mais aussi au racisme et au fascisme que nous vivons quotidiennement dans notre chair. » Car Vérone n’est sure pour personne comment pouvons-nous oublier la loi Turco Napolitano (centre gauche NDT) les centres de rétention qui ont institués par un gouvernement de centre gauche. Beaucoup de personnalités ont adhéré l’appel des migrants parmi lesquels Dario Fo et Franca Rame. Le fait qu’il y a ait deux cortèges est une occasion gâchée face aux pogromes de ces derniers jours, à la centaine d’arrestation et d’expulsions, à la perspective du « paquet sécurité » présenté par le gouvernement et prévoyant l’ouverture de nouveaux centres de rétention et d’autres mesures de répression. Cela aurait été un signal très fort de dire ensemble non au fascisme ancien et nouveau. A Vérone où un jeune a été tué, et à propos duquel le président de la Chambre des Députés, Gianfranco Fini, n’a rien trouvé de mieux que de dire « il est plus grave de brûler un drapeau israélien (référence à une manifestation contre le salon du livre de Turin dédié à Israël) celle d’aujourd’hui sera aussi une occasion, pour les nouveau citoyens de dire la ville qu’ils voudraient et de préparer les nombreuses initiatives organisées par les migrants pour les jours à venir.

Illustration : Johann Heinrich Füssli (1741-1825), "Thetis pleurant la mort d'Achille" Chicago Art Institute

jeudi 15 mai 2008

Un vent noir souffle sur l'Italie (2)

Strange Fruit.
De véritables pogromes anti-Roms ont enflammé Ponticelli, à l'est de Naples où des campements de tziganes ont été incendiés ces derniers jours, dans le quartier, surnommé le "Bronx de Naples".

Un article de Marco Imarisio
pour le quotidien italien "Il Corriere della Sera" du 15 mai 2008
http://www.corriere.it/ témoigne de ce déferlement de haine et de violence, de ce vent noir qui souffle sur l'Italie. Ne nous y trompons pas, les vraie coupables ne sont pas ces napolitains qui s'en prennent à encore plus misérables qu'eux, mais la la droite et d'une partie de la "gauche" qui sème le vent de la haine..

NAPLES - Au début il y a seulement une colonne de fumée, un signal que personne ne lie à l'essaim de cyclomoteurs qui traversent le croisement de rue Argine, deux garçons en selle sur chaque scooter. L'explosion arrive quelque instant après : ce sont les bouteilles de gaz entreposées dans une baraque prise par le feu.. Les flammes arrivent jusqu'à à la limite des lampadaires, la fumée devient un nuage noir et toxique, gonflée d'ordures et de plastiques calcinés Les baraques des Rom de la rue Malibrand forment un
énorme bûcher.
Ponticelli, 13h30, le règlement de comptes avec les "tziganes" est définitif et sans pitié. La circulation qui devient folle, le son des sirènes, les camions des pompiers, des papiers noircis qui voltigent dans l'air, les agents de garde au camp qui se regardent, perplexes. Ils restaient devant, ceux à cyclomoteur sont arrivés par derrière. Ils ouvrent les bras, ensuite, ce n’est pas si grave, beaucoup des rom étaient partis dans la nuit. "Cela aurait été mieux mieux" s'ils avaient été là”, regrette un homme en polo noir Adidas. "Ceux-là on devrait tous les tuer." Il parle depuis l'habitacle de sa Fiat Punto, où est accroché bien en évidence un crucifix où est écrit , "Sainte Maria delle Arco protégez -moi."


Le premier acte du spectacle, parce qu'il y en aura d’autres, s’est déroulé devant la Villa communale, l’unique oasis de verdure, avec piste cyclable annexe, de ce quartier à la périphérie orientale de Naples, où l'horizon est délimité par de vieux Hlm, filles de la spéculation immobilière voulues par Achille Lauro. Un homme grisonnant avec un blouson de jeans sur les épaules est le plus enthousiaste. “Qui travaille honnêtement peut rester, mais pour les autres il faut prendre des mesures, même avec le feu." Le feu purifie, il bonifie le terrain”."De ces merdes qui ne se lavent jamais", ajoute un garçon avec des lunettes de soleil, cheveux gominé, tee shirt à la mode avec un coeur dessiné dessus, celui produit par Vieri et Maldini. Il y n'a pas de démocratie et l'État ne nous protège pas. Il ajoute, “la purification ethnique est nécessaire" mais comprend-il vraiment le sens de cette phrase ? Quand ils sont devant les télévisions, la réalité devient plus présentable, on embellit. La grosse femme avec le sac à provisions qui l’instant d’avant applaudissait et invectivait les pompiers -"laisse les brûler, autrement ils reviennent ”- “Sainte Vierge quel désastre, pauvres diables, heureusement qu'ils ne reste personne là-dedans”. Le garçon aux lunettes de soleil devient soudainement plus calme: "c’est juste de les chasser, mais pas de cette manière." La caméra de télévision s'éteint, il éclate de rire. Sous à un arbre, de l'autre côté de la rue, il y àa un groupe de garçons qui observe la scène. Ils regardent tout et tous le monde, personne ne les regarde. Ils semblent invisibles. Leur scooter est garé sur le trottoir. Le chef est un garçon avec un tee shirt moulant noir, les cheveux coupés courts sur le côté. Tous les présents savent qui il est, ils en connaissent avec précision sa parenté. C'est un des petits-enfants du cousin du "maire" de Ponticelli, ce Ciro Sarno qui même depuis la prison continue à être le signore du quartier, chef d'un clan de la camorra qu'il a fait de l'enracinement dans le quartier sa force. Quand il voit que la confusion est à son maximum, il fait un signe aux autres. Ils s’activent et, ils démarrent leurs cyclomoteurs. Dix minutes après, du camp adjacent, celui en face des immeubles de douze étages appelés les Cinq tours s'élèvent un autre nuage de fumée dense et épais. Le camp est délimité par un tas d'ordures et de bâches. Ce sont les premiers à brûler, la fumée enveloppe les Hlm. La claque se déplace, à moins de 200 mètres il y a un nouvel incendie à applaudir. Les garçons en cyclomoteur disparaissent. La radio de Police secours informe qu'il y a aussi des flammes dans les deux camps de rue Virginia Woolf, à la frontière avec la commune de Cercola. Sur le sol détrempé il y a une paire de bombes incendiaires rudimentaires. Les roms se sont échappés à la hâte. Dans les baraques il y a encore des marmites sur les fourneaux, les cartables des enfants. À l'entrée d'une de ces habitations en tôle et contre-plaqué, tenu ensemble par une gomme spongieuse il y a un tableau encadré qui contient la photo agrandie d'un enfant souriant, habillé en Polichinelle. Florin, carnaval de 2008, la fête de l’ école élémentaire de Ponticelli.
A 14h50 il commence à pleuvoir à torrents, une pluie battant qui éteint tout. "Il valait mieux finir le travail", dit un homme âgé pendant qu'il se réfugie sous un auvent de la Villa communale. Une demi-heure plus tard, dans le quartier De Gasperi on voit beaucoup de ces visages jeunes qui montaient et descendaient des cyclomoteurs. C'est le fortin des Sarno, des maisons agglomérés ceint par un vieux mur, avec une seule rue pour entrer et une pour sortir, avec des guetteurs qui feignent de lire le journal sur un banc et par contre qui sont payées pour signaler qui va et surtout qui vient. Mais cette chasse à l'homme ne s'explique pas seulement par la camorra. Cela serait rassurant, mais il n'est pas ainsi. En dessous de l’échangeur de l’ autoroute Naples-Salerne, il y a encore les trois derniers camps Rom habités. Des plaques de ciment de l'autoroute tombent des flots d'eau marron sur les baraques. Vous êtes entourées par une série de panneaux en bois. Un groupe de femmes et de garçons qui habite dans les maisons les plus délabrées, celles de la rue Madonnelle traverse la place et se mettent devant :" Venez dehors pour que nous vous tuons", “nous avons préparés les bâtons." La police se démène, un inspecteur tâche de raisonner ces femmes en furie. “Est-ce que vous n’êtes pas des braves gens, c’est ce qu’il leur dit, “Vous allez à l’ église le dimanche, et maintenant vous voulez jeter de pauvres enfants à la rue?” Ouiiii répond le coeur. De derrière les panneaux apparait une fille, la tête couverte d’un foulard trempé de pluie, elle tremble, de froid et de peur. Comme pour se protéger, elle tient sur son sein une fillette de quelques mois. Elle salue une des femmes les plus exaltée, une dame bien en chair. Elle la connaît. "Cette nuit nous partons. S'il vous plaît, ne nous faites pas de mal." La dame écoute en silence. Puis elle fait un pas vers la rom, et elle crache. Elle rate la cible, elle atteint en pleine figure la fillette. L'inspecteur qui restait sur la trajectoire du crachat incendie du regard la femme. Tous les autres applaudissent. "Bien, très bien."
En avant vers le Moyen-Âge, chacun à son rythme

traduction Caius Gracchus

On pourra compléter cet article avec un autre article de la stampa publié par Courrier international qui contextualise les évênements.

Illustration : Léon COGNIET, '1794 - 1880) "Scène du massacre des Innocents" 1824, Musée des Beaux-Arts, Rennes.

mardi 6 mai 2008

Un vent noir souffle sur l'Italie...


Quand la défaite est consommée alors sonne l'heure de la déroute.
La victoire écrasante de Silvio Berlusconi aux élections législatives n'avait pas suffit. Veltroni et les autres dirigeants du PD, se réjouissaient presque d'un résultat qui les laissait comme seul à gauche. Mais le souffle mortel a entrainé la ville symbole, celle dont Veltroni était le maire sortant, celle ou l'autre leader du PD, Rutelli, l'ancien radical laïc passé au génuflexion catholique, le prédécesseur de Veltroni au Capitole, était candidat; Rome est passée à droite. Et pas n'importe qu'elle droite. Le nouveau maire Gianni Alemano, "post" fasciste, gendre du fasciste historique Pino Rauti, condamné il y a quelques années à plusieurs mois de prison pour "squadrisme" (une attaque contre une permanence communiste). Les skinheads , les fascistes non repentis, si visibles à Rome, le disent : c'est un des leurs qui a gagné. Sans doute Alemano s'est-il assagi, est il devenu plus respectable, même s'il reste farouchement anti communiste. Et le peu de "welfare state" qui existe au niveau de la municipalité risque d'être liquidé.
Les héritiers des fascistes historiques gagnent à Rome et, dans le Nord, les nouveaux "fascistes" de la ligues du Nord, qui ont préféré teindre en vert des chemises que d'autres portaient noires, triomphent. Et là encore les fascistes pensent avoir gagnés. Et c'est à Vérone, ville gérés par la ligue, ou le maire Flavio Tosi cultive les provocations contres la Résistance, contres les immigrés, contre tous ce qui n'entre pas dans le moule, à la fin de la manifestation du1er mai, que 5 skinheads ont battu à mort un un jeune homme de 29 ans, Nicola Tommasoli, militant de gauche qu'ils avaient suivis depuis la fin de la manifestation.
Et alors que le viol d'une jeune touriste à Rome, sert d'argument électoral contre les immigrés, la droite minimise cet acte qui est loin d 'être isolé.
cette agression intervient après une série d’attaques qui témoignent d’une véritable recrudescence des violences de groupuscules d’extrême droite dans tous le pays, que ce soit contre des immigrés, des jeunes des centres sociaux ou des cercles homosexuels.
Et que dit le nouveau président de la Chambre , le post Fasciste Gianfranco Fini? Pour lui "les contestations de la gauche radicale au salon du livre de Turin sont beaucoup plus graves que ce qui est arrivé à Vérone" Il fait référence à la campagne contre la présence d'Israel au salon du livre. En effet pour le troisième personnage de l'Etat, si l'agression de Vérone n'a pas de base idéologique, à Turin les franges de la gauche radicale "cherchent d'une certaine façon à justifier sous couvert d'anti sionisme un authentique anti sémitisme".
Si le président de la Chambre le dit....

Illustration : Jules Elie Delaunay (1828-1891) "Peste à Rome" Paris, musée d'Orsay

samedi 19 avril 2008

Un appel d'Italie pour l'unité des communistes

Après le désastreux résultats de la gauches italienne aux élection législatives, est lancé un appel à l'unité et l'autonomie des communistes : pas de dirigeants connus du PRC ou du Pdci dans cet appel mais des personnalités , militants de bases ou intellectuels (certains connus des lecteurs de ce blog.: Losurdo, Canfora, le dessinateur Vauro, Vattimo etc... voir l'appel et la liste des premiers signataires)


Appel : "Communistes : commençons par nous"

Après l’effondrement de la Gauche Arc en ciel, nous nous adressons aux militants et aux dirigeants du Pdci et du Prc et à tous les communistes de toute l’Italie

Nous sommes des communistes de notre temps. Nous avons choisi de rester dans les mouvements et au cœur du conflit social. Nous avons des histoires et des sensibilités différentes: nous savons que ce n'est pas le temps des certitudes. Nous avons le sens, même critique, de notre histoire, que nous ne renions pas; mais notre regard est tourné vers le présent et vers l'avenir. Nous n'avons pas la nostalgie du passé, mais plus que jamais d'un avenir meilleur.

Le résultat de la Gauche Arc en Ciel est désastreux. Elle obtient non seulement un quart de la somme des votes des trois partis en 2006 (10,2%) – sans compter que n’existait pas alors Sinistra Democratica – mais recueille encore moins de la moitié des votes obtenus il y a deux ans par les deux parti communistes (PRC et PdCI), qui ensemble dépassaient 8%. Et d’un peu plus d’un tiers le meilleur résultat (8,6%) de Rifondazione, quand elle était encore unie. Trois millions de voix ont été perdue depuis 2006. Et pour la première fois dans l’Italie d’après guerre aucun communiste n’entre au parlement.

Ce résultat électoral a des racines beaucoup plus profonde que la seule explication par le "vote utile": il résulte de l'immense et profonde déception du peuple de la gauche et des Mouvements envers la politique du gouvernement Prodi, ainsi que de l'émergence au sein de l'Arc-en-ciel d'une perspective de liquidation de l'autonomie politique, théorique et organisationnelle des communistes au profit d’une nouvelle formation non communiste, non anticapitaliste, orientée vers une position et une cultures néo-réformistes. Une formation qui n'aurait aucune valeur alternative et qui serait subalterne au projet modéré du Parti Démocrate et à une logique d'alternance au sein du système.

Le temps des choix est arrivé: Voici le nôtre.

Nous ne partageons pas la perspective de constitution d’un « sujet unique » de la gauche dont quelques-uns demandent obstinément une "accélération" malgré sa faillite politique et électorale.

Nous proposons par contre une perspective d'unité et d’autonomie des forces communistes en Italie, par un processus d'agrégation qui, à partir des forces majeures, PRC et PdCI, aille au-delà de celles-ci en impliquant autres subjectivités politiques et sociales sans sectarisme ou logiques autoréférentielles.

Nous lançons un appel aux militants et aux dirigeants de Rifondazione, du PdCI, d'autres associations ou réseaux, et aux centaines de milliers de communistes sans carte qui dans les années écoulées ont contribué, dans les Mouvements et dans les luttes, à poser les bases d'une société alternative au capitalisme, afin qu'ils ne liquident pas les expressions organisées des communistes et qu’ils entament un processus ouvert et innovant tourné vers l’objectif de la construction d'une "maison commune" des communistes.

Nous nous adressons:

-Aux travailleuses, aux travailleurs et aux intellectuels des anciens et nouveaux métiers, aux précaires, au syndicalisme de classe et de base, aux classes sociales qui aujourd'hui « n’y arrive plus" et pour qui "les fins de mois difficiles » ne sont pas seulement un titre de journal: Ensemble ils représentent la base structurante et de classe indispensable à chaque lutte contre le capitalisme;

-Aux mouvements de jeunesse, féministes, environnementalistes, pour les droits civils et de lutte contre toutes les discriminations sexuelles. Dans la conscience qu'aujourd’hui la lutte pour le socialisme et le communisme ne peut retrouver sa charge originaire de libération intégrale uniquement s'il est capable d'assumer aussi dans son propre horizon les problématiques mise en évidence par le mouvement féministe;

-Aux mouvements contre la guerre, internationalistes, qui luttent contre la présence des armes nucléaires et des bases étrangères militaires dans notre Pays, qui sont du coté des pays et des peuples (comme les Palestiniens), qui essaient de se libérer de la tutelle militaire, politique et économique de l'impérialisme;

-Au monde des migrants, qui représentent l'irruption dans les sociétés les plus riches des injustices terribles que l'impérialisme continue à produire à l’échelle planétaire. Parce que c’est seulement de la rencontre multiethnique et multiculturel que peut naître - dans la lutte commune - une culture et une solidarité cosmopolite, non intégriste, anti-raciste, ouverte à la "diversité" qui fasse avancer l'humanité entière vers l'horizon d’une vie commune supérieure et de paix

Nous souhaitons un processus qui dès le début se caractérise par sa capacité à promouvoir une réflexion problématique et même autocritique. Qui recherche aussi les raisons pour lesquelles une expérience riche et prometteuse comme celle à l’origine de Rifondazione Comunista n’a pas été capable de construire ce parti communiste dont le mouvement ouvrier et la gauche avaient et ont besoin; et qui recherche pourquoi ce processus a été marqué par des divisions multiples, des séparations, des défections qui ont déçu et éloigné du militantisme des dizaines de milliers de camarades. Nous demandons une réflexion sur les raisons qui ont rendu fragiles et inadaptée l'enracinement social et de classe des partis qui viennent de cette expérience, et aussi les fautes qui nous ont porté dans un gouvernement qui a déçu les attentes du peuple de gauche et qui est aussi à l’origine du retour de la droite

Il faudra du temps, de la patience et du respect réciproque pour cette réflexion.

Car si nous l'éludions, les fondations de la reconstruction se révèleraient trop précaires. Nôtre engagement n’est pas contradictoire avec l'exigence bien comprise d'une plus vaste unité d'action de toutes les forces de gauche qui ne renoncent pas au changement. Ni elle n’exclut la recherche de convergences utiles pour endiguer l'avancée des forces plus ouvertement réactionnaires. Mais de telles forces unies à gauche auront d’autant plus de succès que sera plus avancé le processus de reconstruction d'un parti communiste fort et unitaire, à la hauteur des exigences de notre temps

Que – bien plus qu’aujourd’hui - il sache vivre et s’enraciner dans la société d'abord et ensuite dans les institutions. Parce que seul l'enracinement social peut garantir solidité et perspectives de croissance et poser les bases d’un parti qui ait son organisation autonome et son rôle politique autonome avec une influence de masse, et ce malgré l'actuelle exclusion du Parlement et même dans l'éventualité de nouvelles lois électorales encore plus négative

La manifestation du 20 octobre 2007, dans laquelle un million de personnes a défilé avec enthousiasme sous une marée de drapeaux rouges avec les symboles communistes, montre - plus que n’importe quel discours - qu'il existe dans l'Italie d'aujourd'hui l'espace social et politique pour une force communiste autonome, combattive, unie et unitaire, qui sache être l'axe d'une plus vaste mobilisation populaire à gauche, qui sache parler - parmi d’autres - aux 200.000 de la manifestation contre la base de Vicenza, aux délégués syndicaux qui ce sont battu pour le NON à l'accord de gouvernement sur le Welfare et les retraites, aux 10 millions de travailleurs et travailleuses qui ont soutenu le référendum sur l'art.18.

Nous espérons que cette appel – mais aussi à travers des rencontres et des moments de discussion ouverte - rassemble un vaste courant d’adhésion dans chaque ville, territoire, lieu de travail et d’étude, partout où il y a un homme, une femme, un garçon et une fille qui ne considèrent pas le capitalisme comme l'horizon indépassable de la civilisation humaine.


Traduction Caius Gracchus


Voir l' appel sur www.comunistiuniti.it


Illustration : Tina Modotti, (1896 - 1942) "Faucille marteau et étoile"

lundi 14 avril 2008

"Là ou Ochetto avait échoué Bertinotti a réussi..."

C'est ainsi que Flavia D'angeli de Sinistra Critica a commenté les résultats de la Gauche Arc en ciel aux élections législatives. Pour la première fois depuis la guerre il n' y aura pas d'élu communiste au Parlement.
avec 3,08% aux élection à la chambre des députés et 3,2% au sénat, non seulement le rassemblement du PRC, du PDCI, des démocrates de gauches et des Verts fait moins que le seul PRC aux précédentes élections, mais il ne réussit pas à avoir le moindre
député ou Sénateur. Plus qu'une défaite un véritable désastre, "l'année zéro de la gauche". Ce résultat, même s'il est surprenant dans son aspect radical, était prévisible. Le vote utile aura joué son rôle, bien sur. Mais c'est aussi le résultats d'une participation calamiteuse au gouvernement Prodi. Combien auront couté dans le résultat final l'abandon du symbole communiste? combien auront couté les déclarations de Fausto Bertinotti qui ne réservait au communisme que le rôle d'un simple "courant culturel" au sein de la gauche? Combien aura couté l'exclusion des listes des opposants les plus résolus à la liquidation de l'autonomie communiste, ceux qui se reconnaissent dans la revue l'Ernesto?
Ce résultat ne saurait réjouir. La démocratie représentative italienne en s'enfonçant dans le bipartisme, non seulement fait gagner la droite (avec une ligne du Nord qui retrouve des scores importants), mais éjecte du parlement des courants importants de la vie politique et sociale italienne. Les mouvements sociaux, les pacifistes, les altermondalistes n'auront plus de relais institutionnels. Ce résultat marque un jour sombre pour la démocratie en Italie, pas seulement pour la gauche. Il est bien le résultat du changement qu'avait initié Achille Ochetto lorsqu'il avait entamé le processus de disparition du PCI; Aujourd'hui il n' y a plus de parti se revendiquant de la gauche au parlement italien.
Là où Ochetto avait (temporairement) échoué, Bertinotti a réussi, en effet...

samedi 12 avril 2008

Un appel qui vient d'Italie contre la campagne anti-chinoise


Un appel lancé par Losurdo, Vattimo, D'Orsi, Canfora et d'autres

Appel : Une campagne indigne de démonisation de la République populaire de Chine est en cours.

Une campagne indigne de démonisation de la République populaire de Chine est en cours. A la direction et à l’orchestre sont les gouvernements et les organes de presse plus que jamais décidés à avaliser le martyr interminable du peuple palestinien et toujours prêt à déchainer et approuver les guerres préventives comme celle qui, en Irak, a déjà provoqué des centaines de milliers de morts et des millions de réfugiés.

Ils agitent la bannière de l’indépendance (camouflée sous le terme « d’autonomie ») du Tibet, mais si cet objectif était obtenu alors on verrait le même mot d’ordre lancé aussi pour le « Grand Tibet » (un territoire trois fois plus vaste que le Tibet proprement dit) et puis pour le Xinjiang, pour la Mongolie intérieure pour la Mandchourie et pour d’autres régions encore. La réalité est que dans son projet fou de domination planétaire, l’impérialisme vise le démembrement d’un pays qui depuis plusieurs siècles s’est constitué sur une base multiethnique et multiculturelle et qui voit aujourd’hui cohabiter 56 ethnies. Ce n’est certes pas le Tiers monde qui promeut cette croisade, lui qui regarde la Chine avec sympathie et admiration, mais l’Occident qui à partir de la guerre de l’opium avait précipité le grand pays asiatique dans le sous développement et dans une immense tragédie, de laquelle un peuple, qui représente le cinquième de l’humanité, a pu finalement sortir

Sur la base de mots d’ordre analogues à ceux qu'on hurle contre la Chine, on pourrait promouvoir le démembrement de nombreux pays européens : parmi lesquels l’Angleterre, la France, l’Espagne et surtout l’Italie où ne manque pas les mouvements qui revendiquent la « libération » et la sécession de la Padanie.

L’Occident, qui se pose en Saint Siège de la religion des droits humains, n’a rien dit sur les pogroms antichinois qui le 14 mars à Lhassa ont coûté la vie à des civils innocents y compris des vieillards, des femmes et des enfants. Alors qu’il proclame être à la tête de la lutte contre le fondamentalisme, l’Occident déforme de la manière la plus grotesque la réalité du Tibet du passé (fondé sur la théocratie et sur l’esclavage et sur le servage de masse) et se prosterne devant un Dieu-roi engagé à construire un Etat sur la base de la pureté ethnique et religieuse (même une mosquée a été prise d’assaut à Lhassa) en annexant à cet État des territoires qui, oui, sont habités par des Tibétains, mais qui n’ont jamais été administré par un Dalai Lama : c'est le projet du Grand Tibet fondamentaliste cher à ceux qui veulent mettre en crise le caractère multiethnique et multiculturel de la République Populaire Chinoise pour pouvoir mieux la démembrer.

A la fin du 19ème siècle en Chine, à l'entrée de la concession occidentale était bien visible l’écriteau « entrée interdite aux chiens et aux Chinois » ; Cet écriteau n’a pas été enlevé, il a seulement subi quelques modifications, comme le démontre la campagne visant à saboter ou à entraver de quelques manière que ce soit les Jeux olympiques de Pékin : « entrée des Olympiades interdites aux chiens et aux Chinois ». La croisade anti-chinoise en cours est en pleine continuité avec la longue et infâme tradition impérialiste et raciste.

Domenico Losurdo, filosofo
Gianni Vattimo, filosofo
Luciano Canfora, storico
Carlo Ferdinando Russo, direttore della rivista "Belfagor"
Angelo d’Orsi, storico

/...

(traduction caius Gracchus)

liste des signataires et l'appel en italien sur le site http://www.appellocina.blogspot.com/

vendredi 4 avril 2008

Elections en Italie : que va-t-il se passer à gauche ?

Dans un climat morose et de faible intérêt des italiens pour la campagne électorale, les élections à la Chambre et au Sénat semblent se réduire à un duel entre deux partis : celui de Silvio Berlusconi, qui a rallié l’Alliance nationale de Gianfranco Fini, ainsi que la ligue du Nord et les autonomiste sicilien, et qui est donné largement gagnant, et le Parti Démocrate, autour de la candidature de Walter Veltroni.

Seuls deux autres coalitions semble pouvoir émerger d’une bipolarisation accentuée : Celle autour de l’UDC de Pier ferdinando Casini qui tente de recréer, au centre droit, une force Démocrate chrétienne et la tentative unissant les gauches au sein de la Gauche Arc en ciel , avec Fausto Bertinotti, le président de la chambre et leader de Rifondazione Comunista, comme candidat à la présidence du Conseil.
Même si la faucille et le marteau ne disparaissent pas complètement (comme symbole électoral) avec le présence de la liste Sinistra Critica, issue d’une scission de certains courants trotskiste de Rifondazione Comunista, il n’ y aura pas, pour la première fois depuis la guerre, de parti communiste se présentant sous ses propres couleurs devant les électeurs …

Si les partis de gauche - Parti des communistes italien (Pdci), Rifondazione, les Verts et les démocrates de gauches - se présentent sous une seule bannière, celle de la Gauche Arc en ciel, cette unité ne survivra sans doute pas aux prochaines élections ; En effet il y a, à gauche, deux projets inconciliables :

- D’un côté celui de la création d’un nouveau parti de gauche abandonnant la référence au communisme, bref comme dit Achile Ochetto, le fossoyeur du PCI, « la réalisation du projet que j’avais en tête à la Bolognina » (du nom du lieu ou se tint le congrès de liquidation du PCI).
Sur cette ligne, la gauche démocratique, qui se revendique de la social démocratie, de Fabio Mussi , Armando Cossuta qui a quitté le Pdci (qu’il avait fondé), le groupe dirigeant de Rifondazione avec Bertinotti très en pointe sur cette question et quelques petits groupe dans l’orbite du PRC ralliés dans le projet de Sinistra Europea.

- Et de l’autre, celui qui souhaite le maintient d’une autonomie du courant se référant au communisme même s'il ne s'oppose pas à des alliances et la constitution d'une force au sein de laquelle chacun garde son identité. (ligne similaire pour les Verts qui sont majoritairement pour le maintient de leur autonomie et opposés au parti unique)
Sur cette ligne, le secrétaire du Pdci Oliviero Di Liberto. Ainsi que, à Rifondazione, les courant de l’Ernesto (dont les sortants -un sénateur et un député- ou tout leur représentant ont été évincé des listes ), et Essere Comunisti, ainsi que de large fraction de l’ancienne majorité bertinottienne.

Bien sur le débat n’est pas entièrement tranché. Cela dépendra aussi des résultats de la Gauche Arc en Ciel aux élections. Les sondages sont nettement au dessous du potentiel électoral des forces qui la constituent (dispersées elles avaient rassemblées autour de 10 % des suffrages lors des précédentes élections).
En tout cas tout laisse à penser que Rifondazione ne survira pas à son prochain congrès et qu’à côté du nouveau parti « arc en Ciel » un nouveau parti communiste va émerger. Les élections européennes (là ou il n’existe pas de barrage en pourcentage pénalisant les petits partis) permettront-elles de voir les premiers pas électoraux de cette nouvelle formation?

Caius Gracchus


Pour compléter cet article on peut lire un texte de Leonardo Masella, responsable exécutif de la tendance L'ERNESTO, traduit en français par Réveil communiste : BERTINOTTI DE LA RIFONDAZIONE COMUNISTA A LA RIFONDAZIONE SOCIALISTA

jeudi 3 avril 2008

Le Tibet, l’impérialisme et la lutte entre progrès et réaction


Encore un article fulgurant de Domenico Lossurdo sur le Tibet. Un Extrait de la deuxième édition de Fuir l’histoire ? La révolution russe et la révolution chinoise aujourd’hui , 2007, éditions Delga Publié sur le site Le Grand Soir

Pour une certaine gauche, les films d’Hollywood sont toujours plus importants que les livres d’histoire et d’analyse critique de la réalité.

1. Les États-Unis, le dalaï-lama et les bouchers indonésiens
Seuls l'intervention de la flotte américaine en 1950 et le recours de Washington dans les années suivantes à la menace nucléaire peuvent empêcher l'armée populaire dirigée par les communistes de compléter la libération et l'unification du pays, en fermant ainsi pour toujours un des chapitres centraux de l'histoire de la « Chine crucifiée ». En plus de la sécession de Taiwan, l'impérialisme cherche aussi à promouvoir celle du Tibet. Et dans ce cas aussi, la gauche montre son caractère subalterne et son manque de mémoire historique. Fut un temps, elle s'engageait dans des lectures sophistiquées et absorbantes, aujourd'hui elle se nourrit seulement de la grande presse d'information et de désinformation. Tout sympathisant et (...)
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mercredi 2 avril 2008

"Elle est belle ma Ferronnière, elle est belle !"


"Au Louvre, la grande braderie continue. Vous êtes millionnaire, vous souhaitez organiser une exposition, rien de plus facile : demandez lui des chefs-d'œuvre, il vous les accordera sans difficulté pourvu que vous payiez suffisamment. Seule la Joconde, paraît-il, n'est pas à louer. Du moins officiellement. Mais les autres Vinci, aucun problème.

Après Lens, Atlanta ou Abou Dhabi, voici donc Vérone. Ou comment louer pendant cinq mois 140 œuvres parmi les plus importantes du musée, sans aucun objectif scientifique. [...]"

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mardi 1 avril 2008

Le Kosovo : une colonie de l’Otan dans le Nouvel Ordre Mondial

Voici, après quelques articles sur la Chine, un remarquable article de Diana Johnstone sur le Kosovo...

"On se croirait dans le Meilleur des mondes. La machine de propagande occidentale a tourné à plein rendement pour célébrer le dernier miracle de l'Otan : la transformation du Kosovo serbe en Kosova albanais. Par le pouvoir des médias, le fait que les États-Unis se sont emparés sans vergogne d'un territoire d'importance stratégique qui ne leur appartient pas, pour y installer une base militaire gigantesque (Camp Bondsteel), a été transformé en une édifiante légende de « libération nationale"...

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Illustration : fresque du monastère de Décani (14e s, Kosovo)

lundi 31 mars 2008

Chine ,Tibet et bonne concience....

Toute la campagne autour des évènements du Tibet et le discours sur le boycott des jeux Olympiques de Pékin commence à sérieusement m’agacer. Et ce qui m’agace encore plus c’est position de nombres de militants de "gauche" et d’extrême gauche qui se rallie à la campagne pro Dalai lama et mouvement indépendantiste tibétain.

Non pas que j’ai une particulière connivence avec la réalité chinoise. Mais je ne supporte pas qu’on juge les réalités des autres à l’aune de nos désirs et de nos fantasmes. La Terre et les autres pays ne sont pas un terrain de jeux pour les militants de “gauche” européens. Et je ne crois pas que nous ayons des leçons à donner à un pays, par exemple la Chine, qui a été écrasé et dépecé par les nations européennes, nos pays.

En outre on oublie complètement au passage comment nos révolutions dont nous, militants de gauche, sommes si fières se sont battis sur des répressions et une brutalité (révolutionnaires et contre révolutionnaires) d’une violence inouïe.

Mais non voilà que la « gauche » française si vertueuse reprend l’étendard du Dalai Lama (grand progressiste comme chacun sait…) et proclame son amour du Tibet. Il est dommage que tous ces “citoyens” qui signent pour le Tibet je ne les ai pas vu signer contre les 1000 soldats supplémentaires en Afghanistan, contre le massacre bien réel des africains qui essaie d’immigrer par terre air ou mer en Europe, contre les centaines de milliers de morts en Irak.

Et je dois être un peu bizarre parce que, plutôt que de suivre les militants de « gauches » français qui font d’ailleurs plutôt la preuve pour le moins de leur impuissance à changer l’ordre actuel en France (s’ils n’en sont pas les complice plus ou moins conscient), je préfère regarder la position de ceux qui ne se payent pas de mots, progressistes ou pas, qui savent concrètement ce que veut dire la morsure de l’impérialisme : Et si on regardait la position des Castro, Chavez, Lulla des dirigeants asiatiques, des dirigeants du tiers monde, enfin ceux pas complètement vendu à l’impérialisme, sur la Chine et la situation au Tibet?

Mais dit on ici ou là « si il y a eu émeutes au Tibet c’est qu’il y a problème politique » Qui peut le nier ? pas même les dirigeants chinois en tout cas… Bien sur que les émeutes ont toujours une cause et leur caractère montre le degré de frustration, de colère ou de désespoir de ceux qui y ont participé. Mais cela veut-il dire qui ‘il faut se rallier, même en toute bonne conscience humaniste, sans voir les stratégies en œuvre dans la région et qui dépassent le simple enjeux de la répression des émeutes et du respect de l’identité traditionnelle?

Et si avant de séparer le bien et le mal, du haut de notre arrogance occidentale nous essayions de comprendre? Avons nous vraiment des leçons à donner?

Il faut je crois en finir avec cette formule, répétée à l’infinie par certains militants de gauche et d’extrême gauche, celle de “liberté des peuples à disposer d’eux même”. D’abord parce qu’elle plaque la réponse qui fut trouvé au 19ème en Europe pour régler son compte à l’ancien régime, sur des réalités entièrement différentes. Il faut aujourd’hui prendre cette formule pour ce qu’elle est : une application néo colonialiste d’un imaginaire européen. (Un peu comme les colonialistes allemands, tout imprégnés de leur visions racistes qui séparaient Hutus et Tutsi…)
Il fut se rendre compte, au moins depuis Hitler, que cette formule sert à détruire les ensembles nationaux au profit d’une vision ethnique des états (là au profit du grand état allemand et de ses intérêts propres). Personne mieux que les nazis (mais il s’agit d’une politique allemande antérieur, pas spécifiquement nazi) ne surent utiliser les aspiration “nationales” de tels ou tels peuples pour liquider les états nations de l’est de l’Europe.

Car la question de fond c’est qu’il n’existe pas un état au monde où ne se pose pas la question des “minorités nationales”. Donc le problème n’est pas de se demander s’il existe une identité culturelle tibétaine, elle existe et d’ailleurs même les autorités chinoises le reconnaissent, le problème c’est de ce demander qui décide d’exciter ou non les minorités et leurs revendications (voire de les créer de toute pièce).
Si les Etats-Unis décidaient de soutenir résolument les corses, les bretons, les alsaciens ou les flamands qui dit que la France ne se trouverait pas devant des problèmes majeurs de revendication nationales?

Enfin la réponse à la question de l’adhésion ou non des tibétains dans leur majorité à une revendication nationale en confrontation avec la Chine, elle se trouve dans l’étude des faits eux mêmes: malgré la répression, si cette revendication était majoritaire nous assisterions à un mouvement de masse qui n’existe pas et qui n’a jamais existé au Tibet. Pour le moment, les revendications nationales tibétaines sont très minoritaires, et c’est un choix de les aider à devenir ou non, sinon majoritaires, du moins significatives en terme numérique. Rappelons que ce choix, celui de vouloir dépecer un état souverain en poussant les revendications nationales d’une minorité interne, est non seulement illégal, mais aussi immoral et irresponsable. On voit au Kosovo la conséquence d’un tel choix…

Et enfin selon certains militant de gauche, cela serait faire un cadeau à l’impérialisme que de refuser de soutenir la lutte des tibétains. Peut être ont-ils raison de se révolter, je ne sais pas. Mais il y a une chose que je sais c’est qu’il n’y a pas de meilleurs cadeaux à faire à l’impérialisme que de se rallier à ses mots d’ordre explicite.

Caius

samedi 22 mars 2008

"La Chine, le Tibet et le Dalaï Lama" Un article de 2003 de Domenico Losurdo

Célébré et transfiguré par la cinématographie hollywoodienne, le Dalaï Lama continue sans aucun doute à jouir d’une vaste popularité : son dernier voyage en Italie s’est terminé solennellement par une photo de groupe avec les dirigeants des partis de centre-gauche, qui ont ainsi voulu témoigner estime et révérence à l’égard du champion de la lutte de « libération du peuple tibétain».

Mais qui est réellement le Dalaï Lama ? Disons déjà, pour commencer, qu’il n’est pas né dans le Tibet historique, mais dans un territoire incontestablement chinois, très exactement dans la province de Amdo qui, en 1935, année de sa naissance, était administrée par le Kuomintang. En famille, on parlait un dialecte régional chinois, si bien que notre héros apprend le tibétain comme une langue étrangère, et est obligé de l’apprendre à partir de l’âge de trois ans, c’est-à-dire à partir du moment où, reconnu comme l’incarnation du 13ème Dalaï Lama, il est enlevé à sa famille et enfermé dans un couvent, pour être soumis à l’influence exclusive des moines qui lui enseignent à se sentir, à penser, à écrire, à parler et à se comporter comme le Dieu-roi des Tibétains, c’est-à-dire comme Sa Sainteté.

1. Un « paradis » terrifiant

Je tire ces informations d’un livre (Heinrich Harrer, Sept ans au Tibet, diverses éditions en français autour du film de J-J. Annaud, je reprends ici la notation des pages de l’auteur de l’article dans la version italienne du livre, chez Mondadori, NdT) qui a même un caractère semi-officiel (il se conclut sur un « Message » dans lequel le Dalaï Lama exprime sa gratitude à l’auteur) et qui a énormément contribué à la construction du mythe hollywoodien. Il s’agit d’un texte, à sa façon, extraordinaire, qui réussit à transformer même les détails les plus inquiétants en chapitres d’histoire sacrée. En 1946, Harrer rencontre à Lhassa les parents du Dalaï Lama, qui s’y sont transférés désormais depuis de nombreuses années, abandonnant leur Amdo natal. Cependant, ceux-ci ne sont toujours pas devenus tibétains : ils boivent du thé à la chinoise, continuent à parler un dialecte chinois et, pour se comprendre avec Harrer qui s’exprime en tibétain, ils ont recours à un « interprète ». Certes leur vie a changé radicalement : « C’était un grand pas qu’ils avaient réalisé en passant de leur petite maison de paysans d’une province chinoise reculée au palais qu’ils habitaient à présent et aux vastes domaines qui étaient maintenant leur propriétés ». Ils avaient cédé aux moines un enfant d’âge tendre, qui reconnaît ensuite dans on autobiographie avoir beaucoup souffert de cette séparation. En échange, les parents avaient pu jouir d’une prodigieuse ascension sociale. Sommes-nous en présence d’un comportement discutable ? Que non. Harrer se dépêche immédiatement de souligner la « noblesse innée » de ce couple (p. 133) : Comment pourrait-il en être autrement puisqu’il s’agit du père et de la mère du Dieu-roi ?
Mais quelle société est donc celle sur laquelle le Dalaï Lama est appelé à gouverner ? Un peu à contrecœur, l’auteur du livre finit par le reconnaître : « La suprématie de l’ordre monastique au Tibet est absolue, et ne peut se comparer qu’avec une dictature. Les moines se méfient de tout courant qui pourrait mettre en péril leur domination ». Ce n’est pas seulement ceux qui agissent contre le « pouvoir » qui sont punis mais aussi « quiconque le met en question » (p. 76). Voyons les rapports sociaux. On dira que la marchandise la plus bon marché est celle que constituent les serfs (il s’agit, en dernière analyse d’esclaves). Harrer décrit gaiement sa rencontre avec un haut- fonctionnaire : bien que n’étant pas un personnage particulièrement important, celui-ci peut cependant avoir à sa disposition « une suite de trente serfs et servantes » (p.56). Ils sont soumis à des labeurs non seulement bestiaux mais même inutiles : « Environ vingt hommes étaient attachés à la ceinture par une corde et traînaient un immense tronc, en chantant en cœur leurs lentes mélopées, et avançant du même pas. En nage, et haletants, ils ne pouvaient pas s’arrêter pour reprendre leur souffle, car le chef de file ne l’autorisait pas. Ce travail terrible fait partie de leur impôt, un tribut de type féodal ». Ç’aurait été facile d’avoir recours à la roue, mais « le gouvernement ne voulait pas la roue » ; et, comme nous le savons, s’opposer ou même seulement discuter le pouvoir de la classe dominante pouvait être assez dangereux. Mais, selon Harrer, il serait insensé de vouloir verser des larmes sur le peuple tibétain de ces années-là : « peut-être était-il plus heureux ainsi » (p.159-160).
Un abîme incommensurable séparait les serfs des patrons. Pour les gens ordinaires, on ne devait adresser ni une parole ni un regard au Dieu-roi. Voici par exemple ce qu’il advient au cours d’une procession :
« Les portes de la cathédrale s’ouvrirent et le Dalaï Lama sortit lentement (…) La foule dévote s’inclina immédiatement. Le cérémonial religieux aurait exigé que l’on se jetât par terre, mais il était impossible de le faire à cause du manque de place. Des milliers de gens se courbèrent donc, comme un champ de blé sous le vent. Personne n’osait lever les yeux. Lent et compassé, le Dalaï Lama commença sa ronde autour du Barkhor (…) Les femmes n’osaient pas respirer ».
La procession finie, l’atmosphère change radicalement :
« Comme réveillée soudain d’un sommeil hypnotique, la foule passa à ce moment-là de l’ordre au chaos (…) Les moines soldats entrèrent immédiatement en action (…) A l’aveuglette, ils faisaient tourner leurs bâtons sur la foule (…) mais malgré la pluie de coups, les gens y revenaient comme s’ils étaient possédés par des démons (…) Ils acceptaient maintenant les coups et les fouets comme une bénédiction. Des récipients de poix bouillante tombaient sur eux, ils hurlaient de douleur, ici le visage brûlé, là les gémissements d’un homme roué de coups ! » (p.157-8).
Il faut noter que ce spectacle est suivi par notre auteur avec admiration et dévotion. Le tout, ce n’est pas un hasard, est compris dans un paragraphe au titre éloquent : « Un dieu lève la mai, en bénissant ». Le seul moment où Harrer a une attitude critique se trouve quand il décrit les conditions d’hygiène et de santé dans le Tibet de l’époque. La mortalité infantile fait rage, l’espérance de vie est incroyablement basse, les médicaments sont inconnus, par contre des médications assez particulières ont cours : « souvent les lamas font des onctions à leurs patients avec leur salive sainte ; ou bien tsampa ( ? NdT) et beurre sont mélangés avec l’urine des saints hommes pour obtenir une sorte d’émulsion qui est administrée aux malades ». (p.194). Ici, même notre auteur dévot et tartuffe a un mouvement de perplexité : même s’il a été « convaincu de la réincarnation du Dieu Enfant » (p. 248), il n’arrive cependant pas à « justifier le fait qu’on boive l’urine du Buddha vivant », c’est-à-dire du Dalaï Lama. Il soulève la question avec celui-ci, mais sans trop de résultats : le Dieu-roi « ne pouvait pas combattre seul de tels us et coutumes, et dans le fond, il ne s’en préoccupait pas trop ». Malgré cela, notre auteur, qui se contente de peu, met de côté ses réserves, et conclut imperturbable : « En Inde, du reste, c’était un spectacle quotidien de voir les gens boire l’urine des vaches sacrées ». (p.294).
A ce point, Harrer peut continuer sans plus d’embarras son œuvre de transfiguration du Tibet prérévolutionnaire. En réalité, celui-ci est lourd de violence, et ne connaît même pas le principe de responsabilité individuelle : les punitions peuvent aussi être transversales, et frapper les parents du responsable d’un délit même assez léger voire imaginaire (p. 79). Qu’en est-il des crimes considérés comme plus graves ? « On me rapporta l’exemple d’un homme qui avait volé une lampe dorée dans un ces temples de Kyirong. Il fut déclaré coupable, et ce que nous aurions nous considéré comme une sentence inhumaine fut exécutée. On lui coupa les mains en public, et son corps mutilé mais encore vivant fut entouré d’une peau de yak mouillée. Quand il arrêta de saigner, il fut jeté dans un précipice » (p. 75). Pour des délits mineurs aussi, par exemple, « jeu de hasard » on peut être puni de façon impitoyable s’ils sont commis les jours de festivité solennelle : « les moines sont à ce sujet inexorables et inspirent une grande crainte, parce que plus d’une fois il est arrivé que quelqu’un soit mort sous la flagellation de rigueur, la peine habituelle » (p. 153). La violence la plus sauvage caractérise les rapports non seulement entre « demi-dieux » et « êtres inférieurs » mais aussi entre les différentes fractions de la caste dominante : on « crève les yeux avec une épée » aux responsables des fréquentes « révolutions militaires » et « guerres civiles » qui caractérisent l’histoire du Tibet prérévolutionnaire (la dernière a lieu en 1947) (p.224-5). Et pourtant, notre zélé converti au lamaïsme ne se contente pas de déclarer que « les punitions sont plutôt drastiques, mais semblent être à la mesure de la mentalité de la population » (p.75). Non, le Tibet prérévolutionnaire est à ses yeux une oasis enchantée de non-violence : « Quand on est depuis quelques temps dans le pays, personne n’ose plus écraser une mouche sans y réfléchir. Moi-même, en présence d’un tibétain, je n’aurais jamais osé écraser un insecte seulement parce qu’il m’importunait » (p.183). Pour conclure, nous sommes face à un « paradis » (p.77). Outre Harrer, cette opinion est aussi celle du Dalaï Lama qui dans son « Message » final se laisse aller à une poignante nostalgie des années qu’il a vécues comme Dieu-roi : « nous nous souvenons de ces jours heureux que nous passâmes ensemble dans un pays heureux » (happy) soit, selon la traduction italienne, dans « un pays libre ».

2. Invasion du Tibet et tentative de démembrement de la Chine

Ce pays « heureux » et « libre », ce « paradis » est transformé en enfer par l’ « invasion » chinoise. Les mystifications n’ont pas de fin. Peut-on réellement parler d’ « invasion » ? Quel pays avait donc reconnu l’indépendance du Tibet et entretenait avec lui des relations diplomatiques ? En réalité, en 1949, dans un livre qu’il publie sur les relations Usa-Chine, le Département d’Etat américain publiait une carte éloquente en elle-même : en toute clarté, aussi bien le Tibet que Taiwan y figuraient comme parties intégrantes du grand pays asiatique, qui s’employait une fois pour toutes à mettre fin aux amputations territoriales imposées par un siècle d’agression colonialistes et impérialistes. Bien sûr, avec l’évènement des communistes au pouvoir, tout change, y compris les cartes géographiques : toute falsification historique et géographique est licite quand elle permet de relancer la politique commencée à l’époque avec la guerre de l’opium et, donc, d’aller vers le démantèlement de la Chine communiste.
C’est un objectif qui semble sur le point de se réaliser en 1959. Par un changement radical en regard de la politique suivie jusque là, de collaboration avec le nouveau pouvoir installé à Pékin, le Dalaï Lama choisit la voie de l’exil et commence à brandir le drapeau de l’indépendance du Tibet. S’agit-il réellement d’une revendication nationale ? Nous avons vu que le Dalaï Lama lui-même n’est pas d’origine tibétaine et qu’il a été obligé d’apprendre une langue qui n’est pas sa langue paternelle. Mais portons plutôt notre attention sur la caste dominante autochtone.
D’une part, celle-ci, malgré la misère générale et extrême du peuple, peut cultiver ses goûts de raffinement cosmopolite : à ses banquets on déguste « des choses exquises provenant de tous les coins du monde » (p.174-5). Ce sont de raffinés parasites qui les apprécient, et qui, en faisant montre de leur magnificence, ne font assurément pas preuve d’étroitesse provinciale : « les renards bleu viennent de Hambourg, les perles de culture du Japon, les turquoises de Perse via Bombay, les coraux d’Italie et l’ambre de Berlin et du Königsberg » (p.166). Mais tandis qu’on se sent en syntonie avec l’aristocratie parasite de tous les coins du monde, la caste dominante tibétaine considère ses serviteurs comme une race différente et inférieure ; oui, « la noblesse a ses lois sévères : il n’est permis d’épouser que quelqu’un de son rang » (p. 191). Quel sens cela a-t-il alors de parler de lutte d’indépendance nationale ? Comment peut-il y avoir une nation et une communauté nationale si, d’après le chantre même du Tibet prérévolutionnaire, les « demi-dieux » nobles, loin de considérer leurs serviteurs comme leurs concitoyens, les taxent et les traitent d’ « êtres inférieurs » (p. 170 et 168) ?
D’autre part, à quel Tibet pense le Dalaï Lama quand il commence à brandir le drapeau de l’indépendance ? C’est le Grand Tibet, qui aurait du rassembler de vastes zones hors du Tibet proprement dit, en annexant aussi les populations d’origine tibétaine résidant dans des régions comme le Yunnan et le Sichuan, qui faisaient partie depuis des siècles du territoire de la Chine et qui furent parfois le berceau historique de cette civilisation multiséculaire et multinationale. C’est clair, le Grand Tibet représentait et représente un élément essentiel du projet de démantèlement d’un pays qui, depuis sa renaissance en 1949, ne cesse de déranger les rêves de domination mondiale caressés par Washington.

Mais que serait-il arrivé au Tibet proprement dit si les ambitions du Dalaï Lama s’étaient réalisées ? Laissons pour le moment de côté les serfs et les « êtres inférieurs » à qui, bien entendu, les disciples et les dévots de Sa Sainteté ne prêtent pas beaucoup d’attention. Dans tous les cas, le Tibet révolutionnaire est une « théocratie » (p.169) : « un européen est difficilement en mesure de comprendre quelle importance on attribue au plus petit caprice du Dieu-roi ». Oui, « le pouvoir de la hiérarchie était illimité » (p.148), et il s’exerçait sur n’importe quel aspect de l’existence : « la vie des gens est réglée par la volonté divine, dont les interprètes sont les lamas » (p.182). Evidemment, il n’y a pas de distinction entre sphère politique et sphère religieuse : les moines permettaient « aux tibétaines les noces avec un musulman à la seule condition de ne pas abjurer » (p.169) ; il n’était pas permis de se convertir du lamaïsme à l’Islam. Comme la vie matrimoniale, la vie sexuelle aussi connaît sa réglementation circonspecte : « pour les adultères, des peines très drastiques sont en vigueur, on leur coupait le nez » (p. 191). C’est clair : pour démanteler la Chine, Washington n’hésitait pas à enfourcher le cheval fondamentaliste du lamaïsme intégriste et du Dalaï Lama.
A présent, même Sa Sainteté est obligé d’en prendre acte : le projet sécessionniste a largement échoué. Et voilà apparaître des déclarations par lesquelles on se contenterait de l’ « autonomie ». En réalité, le Tibet est depuis pas mal de temps une région autonome. Et il ne s’agit pas que de mots. En 1988 déjà, tout en formulant des critiques, Foreign Office, la revue étasunienne proche du Département d’Etat, dans un article de Melvyn C. Goldstein, avait laissé passer quelques reconnaissances importantes : dans la Région Autonome Tibétaine, 60 à 70 % des fonctionnaires sont d’ethnie tibétaine et la pratique du bilinguisme est courante. Bien sur, on peut toujours faire mieux ; il n’en demeure pas moins que du fait de la diffusion de l’instruction, la langue tibétaine est aujourd’hui parlée et écrite par un nombre de personnes bien plus élevé que dans le Tibet prérévolutionnaire. Il faut ajouter que seule la destruction de l’ordre des castes et des barrières qui séparaient les « demi-dieux » des « êtres inférieurs » a rendu possible l’émergence à grande échelle d’une identité culturelle et nationale tibétaine. La propagande courante est l’envers de la vérité.
Tandis qu’il jouit d’une ample autonomie, le Tibet, grâce aussi aux efforts massifs du gouvernement central, connaît une période d’extraordinaire développement économique et social. Parallèlement au niveau d’instruction, au niveau de vie et à l’espérance moyenne de vie, s’accroît aussi la cohésion entre les différents groupes ethniques, comme confirmé entre autres par l’augmentation des mariages mixtes entre hans (chinois) et tibétains. Mais c’est justement ce qui va devenir le nouveau cheval de bataille de la campagne anti-chinoise. L’article de B. Valli sur La Repubblica du 29 novembre 2003 en est un exemple éclatant. Je me bornerai ici à citer le sommaire : « L’intégration entre ces deux peuples est la dernière arme pour annuler la culture millénaire du pays du toit du monde ». C’est clair, le journaliste s’est laissé aveugler par l’image d’un Tibet à l’enseigne de la pureté ethnique et religieuse, qui est le rêve des groupes fondamentalistes et sécessionnistes. Pour en comprendre le caractère régressif, il suffit de redonner la parole au chroniqueur qui a inspiré Hollywood. Dans le Tibet prérévolutionnaire, en plus des tibétains, et des chinois, « on peut rencontrer aussi des ladaks, des boutans (orthographe non garantie, NdT), des mongols, des sikkimais, des kazakhs, etc ». Les népalais sont aussi largement présents : « Leurs familles demeurent presque toujours au Népal, où eux-mêmes rentrent de temps en temps. En cela ils se différencient des chinois qui épousent volontiers des femmes tibétaines, et mènent une vie conjugale exemplaire ». (p. 168-9). La plus grande « autonomie » qu’on revendique, on ne sait d’ailleurs pas très bien si pour le Tibet à proprement parler ou pour le Grand Tibet, devrait-elle comporter aussi la possibilité pour le gouvernement régional d’interdire les mariages mixtes et de réaliser une pureté ethnique et culturelle qui n’existait même pas avant 1949 ?

3. La cooptation du Dalaï Lama en Occident et dans la race blanche et la dénonciation du péril jaune

L’article de Repubblica est précieux car il nous permet de cueillir la subtile veine raciste qui traverse la campagne anti-chinoise actuelle. Comme il est notoire, dans sa recherche des origines de la race « aryenne » ou « nordique » ou « blanche », la mythologie raciste et le Troisième Reich ont souvent regardé avec intérêt l’Inde et le Tibet : c’est de là qu’allait partir la marche triomphale de la race supérieure. En 1939, à la suite d’une expédition de SS, l’autrichien Harrer arrive en Inde du Nord (aujourd’hui Pakistan) et, de là, pénètre au Tibet. Lorsqu’il rencontre le Dalaï Lama, il le reconnaît immédiatement, et le célèbre, comme membre de la race supérieure blanche : « Sa carnation était beaucoup plus claire que celle du tibétain moyen, et par certaines nuances plus blanche même que celle de l’aristocratie tibétaine » (p. 280). Par contre, les chinois sont tout à fait étrangers à la race blanche. Voilà pourquoi la première conversation que Sa Sainteté a avec Harrer est un événement extraordinaire : celui-ci se trouve « pour la première fois seul avec un homme blanc » (p. 277). En tant que substantiellement blanc le Dalaï Lama n’était certes pas inférieur aux « européens » et était de toutes façons « ouvert aux idées occidentales » (p. 292 et 294). Les Chinois, ennemis mortels de l’Occident, se comportent bien autrement. C’est ce que confirme à Harrer un « ministre–moine » du Tibet sacré : « dans les écritures anciennes, nous dit-il, on lisait une prophétie : une grande puissance du Nord fera la guerre au Tibet, détruira la religion et imposera son hégémonie au monde » (p.114). Pas de doute : la dénonciation du péril jaune est le fil conducteur du livre qui a inspiré la légende hollywoodienne du Dalaï Lama.
Revenons à la photo de groupe qui a mis un terme à son voyage en Italie. On peut considérer comme physiquement absents mais bien présents du point de vue des idées Richard Gere et les autres divas de Hollywood, inondés de dollars pour la célébration de la légende du Dieu-roi, venu du mystérieux Orient. Il est désagréable de l’admettre mais il faut en prendre acte : tournant le dos depuis quelques temps à l’histoire et à la géographie, une certaine gauche se révèle désormais capable de ne plus s’alimenter que de mythes théosophiques et cinématographiques, sans plus prendre de distances même avec les mythes cinématographiques les plus troubles.

Publié dans « L’Ernesto. Rivista Comunista », n° 5, novembre/décembre 2003, p. 54-57.
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio pour le Grand Soir

mardi 18 mars 2008

La situation au Tibet et la nature des informations

Les informations que nous avons actuellement en occident émanent pour l’essentiel de Radio Free, une radio financée par les Etats-Unis, Radio free Europe et Radio free Asie. Les informations officielles venues de Chine confirment partiellement leurs dires, tout aurait commencé par des manifestations de moines mais aurait dégénéré en violences . En revanche des informations gouvernementales chinoises disent que les morts sont des commerçants chinois massacrés par des bandes organisées et elles infirment les thèses du tir par la police chinoise.

Jeudi 13 mars 2008, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, avait accusé les manifestants de “chercher à déclencher des troubles sociaux“..Samedi en marge des travaux de l’Assemblée Nationale chinoise , l’agence Chine Nouvelle a décrit ainsi la situation: “Les manifestations de moines bouddhistes tibétains contre le pouvoir chinois qui ont dégénéré vendredi à Lhassa ont fait 10 morts, et aucun étranger ne figure parmi les victimes.”

Le chef du gouvernement régional du Tibet, Champa Phunstok, a affirmé que les forces de l’ordre n’avaient pas tiré. “Nous n’avons pas ouvert le feu, cependant nous serons sévères avec ces criminels dont les activités visent à diviser la Nation“, a déclaré samedi Champa Phunstok à l’Associated Press en marge de la session annuelle du Congrès national du Peuple, l’assemblée législative chinoise. Selon Chine Nouvelle, “la plupart des victimes étaient des commerçants“.

Selon les informations de radio Free: des manifestations emmenées par des moines bouddhistes tibétains contre le pouvoir chinois ont dégénéré vendredi à Lhassa, la capitale tibétaine mais des témoins auraient fait état de tirs des forces de sécurité, de véhicules et de commerces incendiés.

Lire la suite de cet intéressant article de Danielle Bleitrach sur son site

jeudi 6 mars 2008

Après la mort de Reyes...

Pas trop le temps de publier en ce moment : je suis en plein déménagement...
Mais je tiens à signaler ce passionnant article de Danielle Bleitrach sur les coups fourrés du président Colombien Uribe...

"Révélations : Il y avait des négociateurs français, Uribe et les Etats-Unis et le camouflet à la france

Il est clair que la Colombie et les Etats Unis ont beaucoup de mal à expliquer qu’il y aurait connivence entre Chavez , Correa et les FARC pour pratiquer le terrorisme international. D’abord parce que d’autres pays étaient impliqués non seulement la France mais, les Espagnols et les Suisses. Nous allons voir jusqu’à quel point. Et d’autre part la thèse de la lutte contre le terorisme international, qui justifierait tout de la part des Etats-Unis, a du mal à passer dans le sous continent Amérique latine. Ce sous continent ne cesse de subir le terrorisme d’Etat des Etats-Unis, qui soit directement, soit par le biais d’hommes de main qu’ils protègent comme Posada Carriles, assassinent des hommes d’Etat, destabilisent des gouvernements élus et installent des assassins formés à leur école.

Il faut bien mesurer que ce qui s’est passé en Equateur a soulevé l’indignation générale .En France, les médias aux ordres ont bien tenté de faire porter le chapeau de la crise andine à Chavez, aux FARC ou à tout autre victime (1) mais de toute la planète est venue la réprobation. Les Etats-Unis paraissent bien isolés avec leurs alliés criminels et voyous, Israël et La Colombie. Car ce qui vient de se passer à Gaza crée un contexte, des rapprochements: la Colombie ne serait-elle pas l’équivalent d’Israël pour l’Amérique latine, un danger permanent pour ses voisins sous couvert d’assurer sa sécurité, un massacreur d’une partie de la population autochtone au nom des droits de l’occident sur les Indigènes.

Notre presse servile tente encore de nous cacher ce qui paraît de plus en plus évident: il y avait des négociateurs français à proximité de Reyes, ils préparaient la venue de Sarkozy.[...]"

La suite de l'article sur le blog de Danielle Bleitrach