mercredi 31 octobre 2007

Inaliénabilité : le combat ne fait que commencer

Un article de la Tribune de l'Art contre le désir insatiable de la droite libérale de transformer le patrimoine national en source de profit...

"Depuis le 23 octobre, le Ministre de la Culture a rendu officielle la demande d’un rapport à Jacques Rigaud sur, je cite, « l’aliénation des œuvres des collections publiques ». Christine Albanel y emploie l'expression : « faire respirer les collection publiques ». On retrouve la rhétorique classique qui consiste à employer des termes valorisants pour en réalité recouvrir exactement l’inverse de ce que l’on dit. On cherche rarement à faire respirer quelqu’un que l’on veut tuer. Il est donc temps de se préparer à cette bataille qu’il faudra mener sans faiblesse. Nous devrons tous devoir agir pour empêcher ce qui menace d’être l'une des plus grandes forfaitures de notre histoire culturelle, d'autant qu'elle menace non seulement les musées, mais aussi les œuvres conservées dans les bâtiments publics (églises, hôpitaux, établissements scolaires,...), parfois moins prestigieuses mais plus fragiles et tout aussi essentielles à notre patrimoine. (...)
La suite de l'article de Didier Rykner sur le site de " La tribune de l'art"

Illustration : L'école d'Apelle par Jean Broc

dimanche 14 octobre 2007

"Adieu ma petite maman je vais mourir..."


Une chanson à écouter en songeant à la lettre de Guy Moquet et à l'impudence d'un président...

voir le texte complet de la chanson sur le site de Danielle Bleitrach

Cliquez sur le lien pour écouter :
http://www.marchavet.com/chansons/adieu_ma_petite_maman.mp3

lundi 1 octobre 2007

De la fonction publique française : Un article d’Anicet Le Pors


(Le Monde, 26 sept 2007)

La réforme engagée va à l'encontre des principes d'égalité et d'indépendance des fonctionnaires

L'intérêt général est en France une catégorie noble, éminente, distincte de la somme des intérêts particuliers. Il s'ensuit une distinction franche entre le public et le privé, que matérialise dans notre pays un service public important, fondé sur des principes spécifiques (égalité, continuité, adaptabilité, laïcité), et une fonction publique qui en est le coeur.

C'est dans cet esprit qu'a été élaboré à la Libération le premier statut général des fonctionnaires démocratiques, institué par la loi du 19 octobre 1946, et qu'a été mise sur pied en 1983-1984 une fonction publique " à trois versants " (Etat, collectivités territoriales, établissements publics hospitaliers) faisant relever du statut général 5,2 millions d'agents publics, soit près du quart de la population active, placés, en raison de leur service d'intérêt général, dans une position statutaire, réglementaire et non contractuelle.

Trois principes ont présidé à cette construction. Le principe d'égalité, fondé sur l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " Tous les citoyens étant égaux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. " Nous en avons déduit que seul le concours permet, en droit, d'assurer l'égalité d'accès des citoyens à la fonction publique.

Le principe d'indépendance, conduisant à distinguer le grade, propriété du fonctionnaire, de l'emploi, à la disposition de l'administration, afin de protéger l'agent public (et par là le service de l'intérêt général) de l'arbitraire administratif et des pressions politiques partisanes. C'est ce que l'on appelle le système de la carrière opposé au système de l'emploi en vigueur dans nombre de pays anglo-saxons.

Le principe de responsabilité, fondé aussi sur la Déclaration de 1789, qui dispose en son article 15 que : " La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. " Il s'ensuit que le fonctionnaire, parce qu'il est soumis à cette obligation de service du bien commun, doit avoir la plénitude des droits et devoirs du citoyen et non être regardé comme le sujet du pouvoir politique ou le rouage impersonnel de la machine administrative.

C'est cette histoire et cette conception française du service public et de la fonction publique qui fait qu'en France la corruption y est réduite à l'extrême et que son efficacité est reconnue dans le monde. Le président de la République, à l'évidence dépourvu de cette culture, a entrepris de la mettre à bas. Il n'a pas été mandaté de quelque manière que ce soit à cette fin, contrairement à ce qu'il affirme en ce domaine et en d'autres, comme si son élection lui avait délivré un blanc-seing sur toute question qu'il se réserverait le droit d'évoquer.

LE CONTRAT CONTRE LE CONCOURS

Le statut général des fonctionnaires a déjà subi de graves atteintes. C'est ainsi que la loi Galland du 13 juillet 1987 a réduit la comparabilité de la fonction publique de l'Etat et de la fonction publique territoriale, et par là les possibilités de mobilité de l'une à l'autre. A la même époque, la troisième voie d'accès à l'ENA, ouverte à des syndicalistes, des dirigeants d'associations et des élus locaux ayant fait la preuve de leur attachement à l'utilité commune, a été supprimée ; le droit de grève des fonctionnaires a été placé sous des contraintes restrictives ; le recours aux personnels contractuels a été élargi en infraction au statut général dans un contexte de privatisation et de déréglementation qui n'a pas cessé depuis.

L'entreprise annoncée aujourd'hui est autrement grave. En dénonçant le " carcan du concours " et en le mettant en balance avec le contrat, à l'instar de ce qui a été fait à La Poste, à France Télécom ou au GIAT avec les résultats que l'on sait (bureaucratie, division du personnel, financiarisation des objectifs), en prônant l'individualisation des rémunérations pour mieux esquiver les demandes de revalorisation de l'ensemble des organisations syndicales et encourager le clientélisme partisan sous prétexte de reconnaissance du mérite, en encourageant les départs de la fonction publique au bénéfice d'un humiliant " pécule ", le président engage une véritable " contre-révolution culturelle " sans mandat du peuple français. Cela s'appelle une forfaiture.