mardi 30 décembre 2008

Tabula Gaza...


Pendant que Gaza est écrasée sous les bombes, voici un article du prix Nobel de littérature José Saramgo qui date de 2002 mais garde son actualité :

Traduction d'extraits de l'article de José Saramago, De las piedras de David a los tanques de Goliat (Des pierres de David aux tanks de Goliath), paru dans El País le 21/04/2002.

"Le blond David d'antan survole en hélicoptère les territoires occupés de Palestine. Il lance des missiles sur des innocents désarmés. Le délicat David d'antan conduit les tanks les plus puissants du monde et rase et détruit tout ce qu'il trouve sur son chemin. Le David lyrique qui chantait les louanges de Bethsabée, incarné à présent dans la figure gargantuesque d'un criminel de guerre nommé Ariel Sharon, lance le message 'poétique' qu'il faut au préalable en finir avec les Palestiniens pour après négocier avec ceux qui restent." (...)

"Mentalement intoxiqués par l'idée messianique du grand Israël qui leur permettra de concrétiser enfin les rêves expansionnistes du sionisme le plus radical ; contaminés par la 'certitude' monstrueuse et indéracinable que, dans ce monde catastrophique et absurde, il existe un peuple élu de Dieu et que, de ce fait, et au nom des horreurs du passé et des peurs du présent, toutes les actions inspirées d'un racisme obsessionnel, psychologiquement et pathologiquement exclusiviste, sont automatiquement justifiées et autorisées ; éduqués et endoctrinés dans l'idée que toute souffrance déjà infligée, ou en cours d'infliction, ou qui sera infligée, à n'importe qui d'autre, mais en particulier aux Palestiniens, sera toujours inférieure aux souffrances qu'eux-mêmes ont vécues pendant l'Holocauste, les juifs grattent sans cesse leur propre plaie pour qu'elle n'arrête pas de saigner, pour la rendre incurable, et ils l'exhibent au monde comme s'il s'agissait d'un drapeau. Israël s'approprie les terribles paroles de Dieu dans le Deutéronome : "à moi la vengeance, à moi la rétribution". Israël veut que nous nous sentions, directement ou indirectement, tous coupables des horreurs de l'Holocauste ; Israël veut que nous renoncions à notre plus élémentaire faculté de jugement critique pour que nous nous transformions en un docile écho de sa volonté ; Israël veut que nous reconnaissions de jure ce que pour eux constitue déjà un exercice de facto : l'impunité absolue. Du point de vue des juifs, parce qu'ils ont été torturés, gazés et incinérés à Auschwitz, Israël ne pourra jamais être soumis à la loi. Je me demande si les juifs qui sont morts dans les camps de concentration nazis, ceux qui furent persécutés tout au long de l'histoire, ceux qui sont morts dans les pogroms, ceux qui furent oubliés dans les ghettos, oui, je me demande si cette immense multitude de malheureux n'aurait pas eu honte des actes infâmes que leurs descendants commettent. Je me demande si le fait d'avoir tant souffert ne serait pas la meilleure raison de ne pas faire souffrir autrui."

Gaza par José Saramago



Le sigle ONU, tout le monde le sait, signifie Organisation des Nations Unies, c'est-à-dire, à la lumière de la réalité, rien ou très peu.
Les Palestiniens de Gaza peuvent le dire, ceux dont le stock d’aliments est presque épuisé, ou ceux dont il est déjà épuisé, car c'est ce que le blocus israélien leur a imposé, décidé apparemment, à condamner à la faim les 750.000 personnes répertoriées, là, comme réfugiés.

Il n’y a même déjà plus de pain, la farine vient d’être épuisée, l'huile, les lentilles et le sucre suivent le même chemin. Depuis le 9 décembre, les camions de l'agence des Nations-Unies, chargés d'aliments, attendent que l'armée israélienne leur permette l'entrée dans la bande de Gaza, une autorisation une fois de plus refusée ou qui sera ajournée jusqu'à l’ultime désespoir et l’ultime exaspération des Palestiniens affamés.

Nations Unies ? Unies ? En comptant avec la complicité ou la lâcheté internationale, Israël se moque des recommandations, des décisions et des protestations, il fait ce qu’il veut, quand il veut et comme il veut. Il en est arrivé jusqu'au point d'empêcher l'entrée de livres et d’instruments de musique comme s'il s'agissait de produits qui allaient mettre en péril la sécurité d’Israël. Si le ridicule tuait, aucun politicien ni même un seul soldat israélien ne resterait debout, ces spécialistes en cruauté, ces doctoraux en dédain qui regardent le monde du haut de leur insolence, c'est la base de leur éducation.

Nous comprenons mieux leur dieu biblique lorsque nous connaissons leurs partisans. Jehova, ou Yahvé, peu importe comme on le dise, c’est un dieu rancunier et féroce que les Israéliens maintiennent actualisé en permanence.

Traduction Esteban Garcia
http://cuaderno.josesaramago.org/2008/12/22/gaza/


mercredi 24 décembre 2008

JOYEUX NOEL!



Pour ceux que les bondieuseries agacent, pour mieux supporter la dinde, le fois gras et le petit jésus, rappelez-vous que pour Fidel Castro "Jésus était communiste" et que Chavez déclarait récemment :
"le premier socialiste de notre ère fut le Christ. Je suis chrétien et je pense que le socialisme doit se nourrir des courants les plus authentiques du christianisme"
"Judas était le premier capitaliste... Il a vendu Jésus, le premier socialiste"


Et pour ceux à qui cela ne convint toujours pas, rappelons-nous que Noël vient du latin Natalis (dies). C'est (le jour) natal...et représentait l'anniversaire de la naissance du Sol Invictus (le Soleil Invaincu).
Cette fête se déroulait durant les saturnales qui duraient 7 jours pendant le solstice d'hiver (du 17 au 24 décembre) et étaient l'occasion de multiples réjouissances. Les esclaves étaient libérés de leur servitude le temps de la fête et échangeaient leur rôle avec leur maitre.
Donc que Noël devienne la règle et que les esclaves soient libres, définitivement... ;)

Alors Joyeux Noël!

mardi 16 décembre 2008

Comment je suis devenu marxiste par Pasolini


Voici un beau texte de Pier paolo Pasolini trouvé sur le très joli et tout nouveau blog des communistes du 7ème arrondissement de Lyon.

"Comment suis-je devenu marxiste ?

"Eh bien… j’allais parmi les petites fleurs blanches et bleues du printemps,
Celles qui naissent tout de suite après les primevères,- et un peu avant que les acacias ne s’alourdissent de fleurs,
odorantes comme la chair humaine, qui se décompose à la chaleur sublime de la plus belle saison–
et j’écrivais sur les rivages de petits étangs […]
en compagnie des fils de paysans
qui se baignaient innocemment
alors que je les croyais conscients de ce qu’ils étaient
j’écrivais les poèmes du Rossignol de l’Eglise catholique :
cela se passait en 1943 ;
en 1945 ce fut autre chose.
Ces fils de paysans, ayant un peu grandi,
S’étaient mis un jour un foulard rouge au cou
Et avaient marché
Vers le chef-lieu du canton, avec ses portes
Et ses palais à la vénitienne.
Je compris alors qu’ils étaient journaliers
Et qu’il y avait donc des patrons.
Je choisis le parti des journaliers et je me mis à lire Marx."

vendredi 12 décembre 2008

Italie : Sciopero generale!


Après la Grèce, avant hier, et pour le même motifs, c'est le tour aujourd'hui de l'Italie: grève générale ce 12 décembre contre les réformes anti sociales du gouvernement Berlusconi, à l'appel de la CGIL, des étudiants en luttes contre la réforme Gelmini, et des organisation syndicales de bases.
La CGIL attend 1 millions de personnes dans les 108 manifestation qui auront lieu dans tous le pays. Les autres confédérations syndicales, la CISL et l'IUL, sont absentes, il s'agit d'un petit évènement que la rpture de l'unité syndicale de la part de la CGIL, poussée par les deux principales catégories : les métalos de la Fiom et les travailleurs du secteur public. Ceux-ci appel à ce que mouvement n'en reste pas là et initient pour le mois de janvier une nouvelle grève générale avec une manifestation centralisée à Rome.

samedi 6 décembre 2008

J'achève en ce jour ma trente-sixième année par Lord Byron



Il est temps pour ce coeur de cesser d'être ému
S'il lui est désormais refusé d'émouvoir.
Pourtant, si je ne suis plus l'aimé,
Que j'aime encore !

Mes jours ont leur feuillage jauni,
Fleurs et fruits de l'amour ont passé;
Le ver, le chancre et la douleur
Sont pour moi seul !

Il a, ce feu qui ronge ma poitrine,
L' isolement d'une île volcanique;
Nulle torche ne s'allume à sa flamme
Bûcher funéraire !

L'espoir, la peur, le souci jaloux,
La part enivrante des peines
Et du pouvoir de l'amour me fuient,
Je garde les chaînes !

Mais ce n'est pas le lieu ni le moment
Que des pensées de la sorte m'assaillent
Quand la Gloire orne la bière
Ou ceint le front !

L'épée, l'étendard, et le champ de bataille,
La Gloire et la Grèce les voient autour de nous !
Étendu sur son bouclier, le Spartiate
Ne fut pas plus libre !

Un sursaut ( non de la Grèce, elle est debout !)
Un sursaut, oh mon âme ! Songe en qui
Ton flux vivant reconnaît sa source natale
Et n'hésite plus!

Étouffe en toi ces passions renaissantes,
Homme indigne. Que te laissent
Indifférent et le sourire et le dédain
De la Beauté!

Si tu as regret de ta jeunesse, à quoi bon vivre?
Le lieu de la mort valeureuse
Est ici. Au combat! Viens offrir
Ton dernier souffle!

Recherche, plus souvent rencontrée que voulue,
La tombe d'un guerrier; elle te convient.
Regarde alentour, choisis bien le terrain,
Et gagne ton repos !

Illustration : ODEVAERE, Joseph-Denis Lord Byron sur son lit de mort (v 1826) Groeninge Museum, Bruges

mercredi 3 décembre 2008

Pourquoi nous battons nous?

Je chante ce soir non ce que nous devons combattre
Mais ce que nous devons défendre.
Les plaisirs de la vie.
Le vin qu'on boit avec les camarades.
L'amour.
Le feu en hiver.
La rivière fraiche en été.
La viande et le pain de chaque repas.
Le refrain que l'on chante en marchant sur la route.
Le lit où l'on dort.
Le sommeil, sans réveils en sursaut, sans angoisse du lendemain.
Le loisir.
La liberté de changer de ciel.
Le sentiment de la dignité et beaucoup d'autres choses
Dont on refuse la possession aux hommes.

Robert Desnos, 1938

LES MYSTÈRES DE PARIS


Fantaisie politique en plusieurs tableaux,
sans ordre ni raison,
ni foi, ni loi.

AVERTISSEMENT IMPORTANT.

Lecteur, si tu crois que ce texte n’est pas une fiction, tu te trompes. Que dis-tu ? Qu’on dirait à s’y méprendre le congrès départemental de Paris, tel qu’il s’est tenu les 28, 29 et 30 novembre 2008? C’est bien mal connaître le PCF. La réalité, ce n’est pas dans cet ouvrage frivole que tu la trouveras, mais dans l’auguste livre qu’un de nos plus illustres anciens vient d’écrire.
Les dirigeants sont révocables lors des congrès. Voilà la réalité! C’est l'autorité et le respect qu'on porte à leur action et à leur comportement qui les fait élire.
Maintenant, au diable la réalité et place à la fiction!

Lire la suite de cette fable, instructive, comme toutes les fables...

Image :
Cesare Maccari (1840 – Rome, 1919) Ciceron prononçant la prima Catilinaria au sénat romain (1880), fresque Sala Maccari, du Palazzo Madama (sénat) de Rome

lundi 1 décembre 2008

Développement et progrès


Les mots semblant perdre leur sens même pour les communistes ceux-ci dans leur texte proposent un "nouveau mode de développement"...
Ce mot de "développement est -il neutre? Lors de mon congrès de section un camarde italien a évoqué des belles pages de Pasolini qui caractérisent "développement" et "progrès".
Les voici :

"Deux mots reviennent fréquemment dans les conversations, ce sont même les mots clefs des conversations. Il s'agit de "développement" et de "progrès". Deux synonymes ? Ou, sinon, deux mots qui indiquent des moments différents d'un même phénomène ? Ou en désignent-ils deux phénomènes différents qui pourtant s'intègrent nécessairement ? Ou, encore, désignent-ils deux phénomènes seulement partiellement analogues et synchroniques ? Il faut absolument éclaircir le sens de ces deux mots et leurs rapports, si nous voulons nous comprendre dans une discussion qui concerne de très près notre vie quotidienne et physique.

Voyons : le mot "développement" a aujourd'hui tout un réseau de références qui concerne un contexte indubitablement de "droite".

Qui veut en effet le "développement" ? Je veux dire, qui le veut de façon non pas abstraite et idéale, mais concrètement et pour des raisons d'intérêt économique immédiat ? C'est évident : ce sont ceux qui produisent qui veulent ce "développement-là" ; les industriels. Et puisque le "développement" en Italie est ce développement, ce sont, en l'espèce, et pour être précis, les industriels qui produisent les biens superflus. La technologie (application de la science) a créé la possibilité d'une industrialisation pratiquement illimitée et dont les caractères sont déjà concrètement transnationaux. Les consommateurs de biens superflus sont, pour leur part, irrationnellement et inconsciemment d'accord pour vouloir le "développement" (ce "développement"). Pour eux, il signifie promotion sociale et libération, avec pour conséquence l'abjuration des valeurs culturelles qui leur avaient fourni les modèles du "pauvre", du "travailleur",de I`"épargnant", du "soldat", du "croyant". La "masse" est donc pour le "développement" : mais elle ne vit cette idéologie qu'existentiellement, et c'est existentiellement qu'elle est porteuse des valeurs nouvelles de la consommation. Cela n'empêche pas son choix d'être décisif, triomphaliste et violent.

Qui, par contre, veut le "progrès" ? Ceux qui n'ont pas d'intérêts immédiats à satisfaire à travers le "progrès" : les ouvriers, les paysans, les intellectuels de gauche. Le veulent ceux qui travaillent, et qui sont donc exploités. Quand je dis "le veulent", je le dis dans un sens authentique et total (il peut aussi y avoir quelques "producteurs" qui veuillent, qui sait, sincèrement, le progrès : mais leur cas ne fait pas loi). Le "progrès" est donc une notion idéale (sociale et politique), alors que le "développement" est un fait pragmatique et économique.

C'est maintenant cette dissociation qui nécessite un "synchronisme" entre "développement" et "progrès", étant donné qu'un vrai progrès n'est pas (à ce qu'il semble) concevable sans l'apparition des prémisses économiques nécessaires à son actualisation. Quel a été le mot d'ordre de Lénine dès la victoire de la révolution ? Cela a été un mot d'ordre invitant à l'immédiat et grandiose "développement" d'un pays sous-développé. Soviet et industrie électrique.., Maintenant qu'était gagnée la grande lutte des classes pour le "progrès", il fallait en gagner une autre, sans doute plus obscure, mais pas moins grandiose, pour le "développement". Mais je voudrais ajouter - non sans hésitation - que cela n'est pas une condition nécessaire pour appliquer le marxisme révolutionnaire et réaliser une société communiste. L'industrie et I'industrialisation, ce ne sont ni Marx, ni Lénine, qui les ont inventées : c'est la bourgeoisie. Industrialiser un pays communiste paysan signifie entrer en compétition avec les pays bourgeois déjà industrialisés. Et c'est ce que, en l'espèce, a fait Staline, Et, du reste, il n'avait pas le choix.

Donc : la droite veut le "développement", (pour la simple raison qu'elle je fait) ; la gauche veut le "progrès".

Mais quand la gauche remporte la lutte pour le pouvoir, voilà qu'elle aussi veut - pour pouvoir réellement progresser d'un point de vue social et politique - le "développement". Mais un "développement", dont la configuration est désormais formée et fixée dans le contexte de l'industrialisation bourgeoise. Toutefois, ici, en Italie, le cas est historiquement différent. Aucune révolution n'a vaincu. Ici, la gauche qui veut le "progrès", si elle accepte le "développement", c'est ce "développement" qu'elle doit accepter : le développement de l'expansion économique et technologique bourgeoise.

Est-ce une contradiction ? Un choix qui pose un cas de conscience ? Probablement. Mais il s'agit du moins d'un problème qu'il faut se poser clairement : c'est-à-dire sans jamais confondre, pas même pendant un instant, l'idée de "progrès" avec la réalité de ce "développement". En ce qui concerne la base de la gauche (disons même la base électorale, pour parler de millions de citoyens), la situation est la suivante : un travailleur vit dans sa conscience l'idéologie marxiste et par conséquent, parmi d'autres valeurs, il vit dans sa conscience l'idée de "progrès" ; mais, dans le même temps, il vit dans son existence l'idéologie de la consommation et par conséquent, a fortiori, les valeurs du "développement". Le travailleur est donc dissocié de lui-même. mais ce n'est pas le seul. [...]"
Pasolini dans "Ecrits corsaire"