samedi 11 juillet 2009

Tuez-les à la naissance


Par Valerio Evangelisti, Manifesto 11, juillet 2009

Nous pourrions définir la méthode comme “tuez les à la naissance”.
Elle consiste à identifier des groupes et des individus potentiellement dangereux,connus comme hostiles au système ou à certains de ses aspects, et de les incarcérer ou au moins les harceler de manière préventive, en les enselevissants sous les chefs d'accusation. Et cela au nom de délits, commis dans un passé proche ou lointain, grossis au niveau de crimes énormes. Ou bien pour des faits non encore commis et qui pourraient être commis dans le futur. C'est la ligne adoptée par le gouvernement, avec la connivence de secteurs de la magistrature (aucune illusion sur le fait que tous les magistrats puissent être des Falcone /Borsellino : il suffit de voir certains dîners suspects de quelques uns de leurs membres [1]) et des forces de l'ordre. La preuve en est l’arrestation de 21 étudiants de l'Onda[2] il y a deux jours, et les perquisitions dans toute l'Italie. Le motif officiel invoqué : les escarmouches (les définir comme « affrontements » serait exagéré) du 19 mai dernier à Turin, contre la conférence des Recteurs d'Europe, appelés à approuver la totale privatisation de l'enseignement universitaire. Le véritable motif a été énoncé en toute lettre : les prévenus «auraient pu» contester l'imminente réunion du G8. Ce n'est pas l'unique cas de "lutte préventive aux intentions". Le 10 juin ont été arrêtés quelques militants communistes, sur la base de rien, parce qu'ils «auraient pu» tenter de reconstituer les Brigades Rouges et perturber le G8. Pire encore, l'issue du procès milanais qui a suivi «l'OpérationTramonto, contre les militants du Cpo Gramigna de Padoue et du syndicalisme de base. Au cours des débats, toutes les preuves substantielles sont tombées. Cependant, ces subversifs peu repentis «auraient pu» reconstituer les Brigades Rouges. En conséquence ils ont été condamnés à au moins 15 ans de prison. Puis il y a eu la descente, là encore préventive, à la fête de Radio < Sherwood. Soixante personnes arrêtées, afin de prévenir leurs crimes hypothétiques.

Je ne sais pas pourquoi, mais un souvenir me revient. Mon grand père et ses deux frères, d'Imola, étaient des socialistes notoires. Chaque fois que Mussolini passait par Bologne ils étaient arrêtés. Le motif? Ils « auraient pu » attenter à la vie du Duce. On dira que les temps étaient meilleurs et que la détention durait quelques jours, pas quinze ans. Me vient un doute. L'actuel gouvernement italien ne serait-il pas fasciste? Mais non, me dit-on : le chef est un joyeux libertin, qui rédige des lois garantistes (pour lui) les unes après les autres, et qui a pour président de la République un ancien stalinien. Mais le doute demeure.

Texte traduit par L. A.

Commentaire de la traductrice : Un souvenir me revient aussi : la répression sauvage contre les « rouges », réels ou supposé, au cours des années 70 et 80, à la suite de l’adoption par l’alors ministre de l’Intérieur Francesco Cossiga, des "lois spéciales antiterroristes"

[1] Allusion a l '« affaire » du récent dîner privé de M Berlusconi avec des membres de la Cour Constitutionnelle.
[2] Nom que s’est attribué le récent mouvement étudiant et lycéen contre les réformes de la MinistreGelmini.

lundi 6 juillet 2009

"même le facisme n’était pas allé aussi loin"

Pétition contre les nouvelles lois raciste en Italie

A l'opinion publique européenne et aux journalistes qui en sont l'expression:

Ce qui se produit en Italie a toujours eu, bon gré mal gré, une influence extraordinaire sur la société européenne toute entière, depuis la Renaissance jusqu’au fascisme.
Mais ces événements n’ont pas toujours été connus à temps.

On trouve en ce moment, sur les quotidiens européens, une grande attention concernant divers aspects de la crise qui touche notre pays. Nous considérons, cependant, qu’il est du devoir de ceux qui vivent en Italie de rappeler à l’attention de l’opinion publique européenne d’autres aspects restés dans l’ombre. Il s’agit de certains aspects de la législation italienne qui, si rien ne vient les empêcher, risquent de défigurer le visage de l’Europe et de faire reculer la cause des droits humains dans le monde entier.

Le gouvernement Berlusconi, sous prétexte de sécurité, a imposé au Parlement, qu’il garde sous contrôle, l’adoption de normes discriminatoires envers les immigrés, jamais vues en Europe depuis l’époque des lois raciales.

Le sujet passif de la discrimination a été remplacé. Il ne s’agit plus des juifs mais de la population des immigrés irréguliers, qui compte des centaines de milliers de personnes. Mais les dispositifs prévus par les lois raciales, comme l’interdiction des mariages mixtes, n’ont pas (été) changé(s).

Par cette interdiction, on empêche, en raison de leur nationalité, l’exercice d’un droit fondamental tel que celui de se marier, sans distinction d’ethnie ou de religion. Droit fondamental qui n’est pas supprimé seulement aux étrangers mais également aux italiens eux-mêmes.

Par une norme qui viole encore davantage la dignité humaine on a, en outre, (été) introduit l’interdiction pour des femmes étrangères en situation d’irrégularité administrative, de reconnaître les enfants qu’elles ont elle mêmes mis aux monde.. Ainsi par la force d’une telle décision politique d’une majorité passagère, les enfants mis au monde par des femmes étrangères irrégulières deviendront pour toute leur vie les enfants de personne. Ils seront (soustraits) enlevés à leurs mères et placés dans les mains de l’Etat. Même le fascisme n’était pas allé aussi loin. En effet les lois raciales introduites par ce régime en 1938 ne privaient pas les mères juives de leurs enfants, ni ne les obligeaient à avorter pour éviter la confiscation de leurs enfants par l’Etat. Nous ne nous adresserions pas à l’opinion publique européenne si la gravité de ces mesures n’était telle qu’elle dépasse toute frontière nationale et ne demandait une réaction responsable de toutes les personnes qui croient en une commune humanité.

L’Europe ne peut admettre qu’un de ses pays fondateurs ne rétrograde (redresse) à des niveaux primitifs de cohabitation, en contradiction avec les lois internationales, les principes de garantie et de civilisation juridique sur lesquels se fonde la construction politique européenne elle-même.

Il est de l’intérêt et de l’honneur de nous tous européens que cela ne se produise pas.

L’opinion publique européenne doit prendre conscience de la pathologie qui vient de l’Italie et se mobiliser pour empêcher qu’elle se propage en Europe.

A chacun de choisir les formes opportunes pour manifester et faire valoir son opposition

Premiers signataires : Andrea Camilleri, Antonio Tabucchi, Dacia Maraini, Dario Fo, Franca Rame, Moni Ovadia, Maurizio Scaparro, Gianni Amelio

Pour signer : http://temi.repubblica.it/micromega-online/ cliquez sur "FIRMA"


texte traduit par L. A.

mercredi 1 juillet 2009

Pina Bausch est morte

Alors qu'il semble que le monde entier se lamente après la mort brutale de celui qui représente le sommet (sans doute génial) de la création musicale commerciale, dépolitisé et blanchis, très loin en fait de tout "tragique", disparait, tout aussi soudainement, peut être la la plus grande artiste de la fin du siècle dernier et du début du nouveau siècle.
Assister à une de ses création artistique, reste une des expérience les plus fortes qu'on puisse avoir en tant que spectateur.

Caius

« j’ai vu pour la première fois au théâtre des spectacles qui possédaient la structure de la tragédie, ce qu’on ne voit pratiquement plus sur aucune scène, enfin pour ce qui est du théâtre parlé. Je me trouvais soudain face à un théâtre et qui était sans texte, ce qui m’a directement touché ». (Heiner Muller)

En hommage un extrait de "Café Müller":